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AureliaDawnwood

Il y a 1 an | 289 vues

Récapitulatif mots 1 à 21

Petit disclaimer : Tous les textes écrits pour ce concours font partie de la même histoire, un roman de Romantic Fantasy dont j’ai commencé le premier jet il y a peu, Là où murmurent les fées (si vous avez des questions, n’hésitez pas, je répondrai dans la mesure du possible)

Les textes ne se suivent pas, ils représentent divers moments de l’histoire (le début pour la plupart, mais quelques-uns sont plus tardifs). Étant une auteure jardinière, je brainstorme l’histoire au fur et à mesure de l’écriture. Ce concours, avec ses mots imposés, est un petit challenge que je m’impose pour travailler mon imagination (et ça a bien marché, ça m’a donné des pistes pour mon histoire !)

Petite dédicace à CamilleNC qui a lu quasi tous les textes des participarts, en laissant un commentaire à chaque foi (je manquerai pas d’en faire une dans mon roman quand il sera terminé, merci pour votre investissement !)

Bonne lecture !

 

Jour 1 : Génie

Lili traversa le voile glacé de la caverne. Du givre immobilisa ses ailes ; la vue immobilisa ses pas. Elle porta une main à sa gorge serrée par l’atmosphère lourde. Elle détestait ce rappel à la réalité : la magie incrustée dans la roche, comme les étoiles dans le ciel de la Terre ; les fleurs bleues et blanches dans les poings serrés ; le silence des corps allongés là ; la souffrance éternelle sur le visage de ces Faerys.

Elle pensa à lui. Elle comprenait. Mais elle ne pouvait se défaire de sa volonté.

Un pas après l’autre. Au fond se trouvait le passage vers l’âme qu’elle recherchait. Affronter la mort pour maintenir la vie : le mystère du génie des dieux.

 

Jour 2 : Incandescence

L’abri de Dahut recelait de siècles de souvenirs. La plupart lié au monde marin. Certains murs étaient recouverts d’images que les humains appelaient photographies. La majorité représentait des statues immergées ou des larges de pans de pierre, accompagnées de textes indicatifs. Le nom "Atlandide" apparaissait plusieurs fois. Dahut vivait dans la nostalgie d’Ys, sa cité de naissance, disparue depuis longtemps.

Il y avait d’autres objets, beaucoup plus hétéroclites. Mais alors que Lili s’approchait d’un socle sur lequel reposait une pierre "issue de la lave incandescente de Mont Saint Helens", Dahut tira le rideau bleu.

Derrière, un cercueil en verre. À l’intérieur, le corps de vieil humain.

— Mon mari, annonça-t-elle avec tendresse.
 

Jour 3 : Cirrus

Les battements de son cœur résonnèrent dans sa tête. Son instinct lui soufflait l’arrivée de ce qu’il redoutait. Célian prit une profonde inspiration. Il voulait se dérober, faire comme si de rien n’était. Fuir. Il décida de faire face et leva les yeux. Les inconnus l’avaient reconnu. Le temps fut suspendu dans cet échange de regards lourd de questions, d’attente, de rejet.

— Je savais qu’ils parviendraient à passer mon camouflage, souffla Hazel. Mais pas si tôt.

Célian reprit contact avec la réalité aux mots de son mentor. Tout le monde observait les deux fées. Lui, avec sa peau noire, ses yeux et ses ailes dorées. Elle, aussi blanche que la neige, ses cheveux semblables aux cirrus.

Leurs visages marqués par l’absorption de cristaux illicites

 

Jour 4 : Obsidienne

— Entrez, venez me rejoindre, murmura Lara. Je sais pourquoi vous êtes ici. Mais avant de répondre à vos questions, il faut vous purifier.

Lili et Golden pénétrèrent dans la pièce sombre, les ailes recroquevillées et s’installèrent sur les tabourets. Lara les étudia un moment, prit un coffret en bois posé sur un coin de comptoir poussiéreux et s’assit en face d’eux. À l’intérieur, un pendentif en forme de goutte d’eau noire, aux reflets irisés, qu’elle prit avec douceur.

— Vous avez pris des risques en allant sur Terre. Je ne vous jugerai pas, je comprends votre détermination. Il faut du temps pour le sevrage, un temps que vous n’avez pas. Ce collier d’obsidienne purifiera votre organisme avec violence. À la fois vivants et morts.

 

Jour 5 : Coquelicot

— Qu’est-ce que c’est ?

— Le dessin d’un coquelicot, une fleur terrienne. La fée l’a dessinée en disant que tu lui rappelais ce végétal.

Célian arqua un sourcil. Avec ses cheveux bleus et sa peau claire, il ne voyait pas la ressemblance.

— Les humains associent une signification à diverses choses, comme les fleurs, poursuivit Hazel. Elle m’a dit que dans le territoire terrien appelé Europe, cette fleur est un symbole du souvenir des combattants morts pendant l’une des plus terribles guerres de leur monde. Cette fleur a une couleur vive, mais elle meurt très rapidement.

— Je suppose qu’elle voit en moi celui qui prône la mort, dit Célian, amer.

— À toi de la convaincre de la valeur de nos vies, mon ami.

 

Jour 6 : Cercle

Lili devait absolument trouver un portail, un cercle de fées, comme les appelaient les humains. Mais son état, conséquence de sa présence sur Terre et de la consommation des cristaux, obscurcissait ses capacités de localisation.

Elle s’appuya contre un mur, s’obligea à respirer calmement. Regarda autour d’elle, le sol, le ciel, à la recherche des lignes de magie. Les Faerys avaient quitté ce monde depuis longtemps et les hybrides qui pouvaient encore vivre ici quittaient rarement leur territoire. Beaucoup de ces cercles s’étaient éteints, réduits à l’état de curiosité de la nature pour les humains.

Elle en repéra enfin un. Restait à l’atteindre. Elle avait rendez-vous dans une région nommée Bretagne.
 

Jour 7 : Moucharder

— Il y a quelque chose qui m’interpelle, Hazel, dit Célian. Que ces fées aient pu passer tes protections, c’est une chose, mais c’est supposé être le dernier recours. Cet endroit est censé être secret, n’est-ce pas ?

— Oui, soupira Hazel. J’y pense depuis l’instant où je les ai sentis arriver. Quelqu’un a mouchardé, mais qui ? J’ai confiance en tous ceux qui vivent ici. Je voulais les interroger, mais quand j’ai vu leurs traits tirés, je me suis dit qu’ils ne lâcheraient pas le morceau si facilement.

— J’ai tout de suite remarqué leurs états, ils ont consommé de ces cristaux. Penses-tu qu’ils soient allés sur Terre ?

— J’en suis même sûr, cette drogue a été conçue pour ça.

— Ils n’ont rien dit, pour le moment.

— C’est bien ce qui m’inquiète.

 

Jour 8 : Ordalie

Cette envie de séparer les destinées humaine et faery était encrée dans les gènes de sa famille depuis des dizaines de siècles, peut-être plus, à l’époque où les deux peuples cohabitaient sur Terre. Ses ancêtres n’en avaient sans doute pas conscience : aucune trace écrite ne subsistait en ce sens. Mais il savait qu’il cristallisait leurs frustrations.

Célian effleura un très vieux parchemin. L’auteur, anonyme, y avait consigné un épisode lointain, l’histoire d’une elfe condamnée à mort dans le monde humain : une aïeule de Célian. Soumise à l’ordalie par l’eau, elle avait été plongée dans une rivière. De par sa constitution, elle avait flotté. Un signe, pour ses bourreaux : elle pactisait avec des forces malaisantes.
 

Jour 9 : Scorpion

D’après la tablette, les Humains apportèrent le dernier ingrédient. Le nom de ce dernier manquait ; une omission volontaire, Lili en était certaine. La seule autre information était qu’un certain roi Scorpion avait ajouté lui-même ledit ingrédient. Elle fouilla les notes que Golden lui avait laissées. Il avait entrepris des recherches sur ce fameux monarque.

La légende voulait qu’au moins deux rois aient porté ce nom. Deux rois hypothétiques pour les humains, en absence de preuve formelle de leur existence. Golden avait indiqué qu’il avait fait des recherches sur Faery, en vain.

Il avait indiqué une hypothèse, sans le cheminement de pensée derrière : soit le nom suffisait en lui-même, soit toute trace avait été effacée, par sécurité.

 

Jour 10 : Gourmandise

Célian déposa l’assiette devant son frère. Ce dernier ne broncha pas ; Célian n’en était plus étonné depuis longtemps, mais il essayait, encore et encore. Une part de lui était désespérée, nostalgique de cette époque où Adriel dévorait toutes les gourmandises florales préparées par leur mère. Il avait tenté de lui en préparer peu après le drame, mais Adriel avait envoyé valser le plat. Sans doute la dernière fois qu’il avait paru un tant soit peu vivant.

Il y avait toujours cette petite voix qui se demandait si cela valait le coup de continuer. Il la faisait rapidement taire : abandonner, c’était donner raison à l’ordre établi, celui qui jouait avec la vie des faerys. Celui qui avait plongé son frère dans le mutisme.
 

Jour 11 : Adamantin

Lili et Golden s’engagèrent sur le chemin ombragé. Plus un seul mot ; cette forêt appelait au silence du repos, à cette halte pour reprendre ses esprits. Leurs yeux se levèrent vers la canopée, dans le feuillage duveteux à peine rosé. Leurs doigts effleurèrent les troncs adamantins, comme si les arbres pouvaient leur parler, alors qu’ils se contentaient d’exister.

Cet endroit atténuait la douleur de leur protégé et Lili n’avait pas besoin de se tourner vers Golden pour savoir que, tout comme elle, cette idée le mettait mal à l’aise. Ainsi était ce qu’elle considérait comme la bénédiction et la malédiction du Bois Dormant : un lieu pour retrouver la paix en perdant pied avec la réalité.
 

Jour 12 : Cariatide

— Je pensais qu’il était une légende, dit Lili

— Il existe, répondit Célian. Il entretient le mystère, c’est difficile de démêler le vrai du faux avec lui.

— Pourquoi aller le voir s’il peut nous mentir ?

Célian garda le silence, absorbé par la contemplation de la grande bâtisse blanche encore en partie dissimulée par la brume et la végétation.

— Nous croyons surtout qu’il a oublié la vérité sur certains points. Il y a des histoires sur lesquelles il ne change jamais de version. Ce sont des vérités dont nous sommes sûrs. Est-ce que tu vois les cariatides et les atlantes ? On sait que ce sont des membres de sa famille qu’il a transformés.

— Et sur quels sujets varie-t-il ?

— On ne sait pas s’ils étaient vivants ou morts quand il les a changés.

 

Jour 13 : Rassembler

Célian observa l’attitude des habitants du refuge, rassemblés autour des deux fées. Personne se doutait de la véritable raison de leur présence ; il leur était facile de reconnaître des dépendants et cela suffisait comme explication. Ça et cette habitude ancrée naturellement, presque établie comme une règle : ici, les confidences étaient les bienvenues, mais on ne posait pas de question.

Il sentit le poids d’un regard. Elle l’observait et il soutint. Elle tentait une nouvelle fois un dialogue silencieux ; il lui faisait comprendre qu’il savait, mais qu’il ne répondrait pas à ses attentes. Il vit ses mains trembler, ses doigts se croiser et se décroiser, signe de manque.

Il maudit sa conscience et ce lien entre eux.
 

Jour 14 : Saturne

Lili détailla la statue. Cela ne servait à rien de tenter sa chance du côté de Saturne. La vérité était un trésor qu’il gardait sous son voile. Golden avait tenté des prières, parce qu’il faut bien tenter, même s’adresser à un être dont on n’est pas sûr qu’il puisse nous entendre.

Lili grimaça. Une part d’elle-même avait eu envie de dire "dont on n’est pas sûr qu’il puisse exister". Comment pouvait-elle doutait ? Que les humains doutent de leurs croyances, c’était logique, mis un être magique comme elle, non.

Elle savait pourquoi. Cette impuissance. Pourquoi laissaient-ils faire ? Pourquoi laisser les faeries remettre en cause l’ordre établi ? Laisser à l’abandon ces humains qu’ils aimaient tant ?

 

Jour 15 : Talisman

— Cet endroit nous coupe de notre protégé.

Golden avait immédiatement saisi le petit talisman accroché à son cou. Sa respiration était rauque, ses ailes vibrèrent sur un rythme irrégulier. Lili posa sa main sur son épaule pour le rassurer. Mais elle n’en menait pas large non plus ; ainsi, lui aussi avait ressenti ce vide étrange et déroutant lorsqu’ils avaient pénétré dans cet endroit.

La douleur de Dylan s’était amenuisée, mais de façon étrange, comme un son étouffé. Elle posa ses yeux sur le dôme ; on leur avait dit qu’il servait à cacher cette zone de l’extérieur, mais il avait une autre utilité. Est-ce que son binôme savait ? Est-ce qu’il avait choisi de se couper de leur protégé ?

De l’abandonner ?
 

Jour 16 : Pourpre

Célian pénétra la tente dans laquelle attendait une des Phénix nouvellement arrivés. Assise sur la table, elle balançait ses jambes dans le vide, les ailes sages dans son dos. Aucune flamme n’émanait d’elle, ce qui était étonnant. À en juger par les traits de son visage et la couleur pourpre de ses cheveux et de ses yeux, elle n’avait pas encore atteint l’âge adulte.

Il repéra alors les divers bracelets d’argent qui entouraient ses bras. Il comprenait mieux, à présent : quelqu’un avait limité ses pouvoirs grâce à ce métal. Cela n’avait pas l’air de la gêner. Quel dommage de ne pas laisser cette enfant s’exprimer ; c’est ainsi qu’elle apprendrait le mieux à se maîtriser.

Quand elle le remarqua enfin, elle lui adressa un sourire solaire.
 

Jour 17 : Subrepticement

Il fit tourner la pochette entre ses doigts. Identique à celle de Golden, elle contenait elle aussi des cristaux violets aux effets différents. Un antidote selon Hazel qui l’avait créé ; mais il ne savait pas quels effets il aurait, s’il fonctionnerait. Golden avait refusé de les prendre pour cette raison. Hazel lui avait donc demandé à Célian de remplacer subrepticement la pochette.

Il savait qu’Hazel pensait bien faire ; il voulait aider les fées à se défaire de leur addiction. Mais à leur insu, c’était renier ses principes. Les fées savaient à quoi elles s’exposaient avec ce poison. C’était leur choix.

Il saisit du papier, inscrit quelques mots et accrocha le message à la pochette. Il la déposerait dans l’abri de Golden.

 

Jour 18 : Soupirer

Ses joues creuses. Son teint cireux. Ses cheveux bleus ternes et son regard éteint. Cet elfe faisait peur à avoir et éveillait chez Lili un sentiment de déjà-vu. Il était là, assis, enfermé dans son propre univers, insensible à ce qu’il se passait autour de lui. Seule sa poitrine prouvait qu’il était vivant. Aucun soupir de mélancolie, aucune grimace de douleur.

— C’est mon frère.

Lili sursauta. Elle ne l’avait pas entendu arriver. Son binôme observait cet elfe, un semblant de regrets dans ses yeux de glaces. À y regarder de plus près, il y avait un air de famille.

— Que lui est-il arrivé ?

Il la fixa et ne dit rien pendant quelques instants. Elle avait l’impression que son regard se dressait comme un mur devant elle.

— Il a perdu sa protégée.

 

Jour 19 : Citrouille

D’étranges têtes sculptées, rondes et orange se mêlaient à des masques aux motifs fleuris et colorés. Des squelettes inanimés de nature différente étaient installés autour d’une longue table recouverte d’aliments, certains frais, d’autres en état de décomposition. Des feuilles aux tons chauds recouvraient le sol ; quelques feuilles vertes se perdaient au milieu. D’étranges dalles rectangulaires étaient dressées, avec des inscriptions que Célian ne parvenait pas à déchiffrer.

— Comment peut-il y avoir des citrouilles ici ?

Lili tenait une de ces têtes si particulières. À en juger par son expression, elle était aussi confuse que lui, mais pas pour les mêmes raisons. Qu’était une citrouille ?

 

Jour 20 : Banquise

— Je sais que tu dois venir ici, mais que je hais cet endroit.

Amusée, Lili regarda Golden qui tentait de voleter à quelques centimètres du sol plutôt que de prendre le risque de glisser sur le sol en marchant. Pour un fae de l’été, aller dans la demeure d’une fée de l’hiver était un non-sens. Il avait appliqué un baume de protection contre le froid sur ses ailes, mais ces dernières ne battaient pas correctement sous le vent froid.

Ils sortirent du couvert de la forêt et se retrouvèrent face à l’immensité glacée.

— Il ne nous reste qu’à traverser la banquise.

Golden grimaça et regarda de chaque côté, comme à la recherche d’une autre solution.

— Tu ne veux pas me porter ?

Lili éclata de rire. Et s’exécuta, au grand étonnement de Golden.

 

Jour 21 : Éperdu

Comment réagirait-il, maintenant qu’il quittait ce cocon qui bloquait ce lien avec leur protégé ? Lili surveillait Célian du coin de l’œil. Aucune appréhension visible sur son visage. Elle craignait qu’il ne supportât pas cet afflux d’émotions et qu’il retourne à l’intérieur pour se terrer ; elle craignait aussi qu’il ne ressente rien.

Son visage se transforma et Lili retint son souffle. Célian s’était arrêté, les yeux écarquillés comme s’il avait reçu un coup au visage. Sa mâchoire se crispait dans cette lutte interne. Il serra les poings. Plongea une main de sa sacoche, avant de la ressortir. Entre ses doigts, un bracelet. Celui de son frère.

Il le fixa, éperdu, comme un naufragé s’accroche à sa planche de salut dans un océan agité.