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Lebrac25
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Il y a 8 jours | 35 vues

Amour paternel

Il n'y a pas eu d'avant Jim pour Aymeric . Lorsqu'il entame une relation amoureuse avec Florence qui est enceinte - " Il n' y a pas de père " lui dit-elle - l'homme intègre le futur bébé à sa vie . C'est avec une sincérité et un naturel désarmant qu'il reprendra le rôle : tout au long de la grossesse puis lors de l'accouchement . " T'es un ouf Aymeric " commentera, hilare, son ami ancien codétenu avec qui ce dernier a gardé quelques liens après une erreur de jeunesse .

 

Jim naît et les choses vont de mieux en mieux . Toujours avec cette facilité folle, Aymeric crée autour de lui un quotidien campagnard où Florence, lui et Jim forment une vraie famille . Une famille pleine d'anecdotes, de moments mémorables et furtifs que le protagoniste nous décrit comme une série d'instantanés, d'endroits, de phrases, de brèves scènes colorées : normal, puisque Aymeric est un passionné, un mordu de photographie . Il raconte comme il immortalise .

 

Jim s'épanouit comme tout petit garçon le ferait dans ce terreau idéal . Entre les parties de pêche avec " papa ", les matchs de football dans le garage pour cause de neige à faire trembler les tôles de la baraque, les excursions au grand air et les dîners à la table de Monique - la mère de Florence - qui tient un gîte dans le jura où le roman tient place et connaît la région et sa flore comme sa poche .

 

Le gamin grandit aimé, et Aymeric voit son amour de père grandir au même rythme . "On avait beau avoir le souci, autant Flo que moi, de ne pas trop valoriser les codes masculin et de ne pas lui imposer des pratiques de petit mec, on avait beau l’encourager à s’autoriser à aimer la couleur rose ou tel jouet traditionnellement destiné aux filles, et j’insiste pour dire que je faisais ma part de boulot en la matière, et bien je ne pouvais pas m’empêcher de camper ce personnage de père qui bricole, de père qui n’a peur de rien, de père un peu brutal parfois . "

 

Puis reparaît le père, ou plutôt le géniteur - car il y en avait bien un - qui n'a été un père en rien sauf par le sang, et tout prend un tour dramatique .

 

Car cette adaptabilité, cette gentillesse, cette attitude si simple et naturelle que l'amour d'Aymeric pour son gosse adoptif avait fait naître chez lui va aussi le rendre aveugle - ou était ce un déni protecteur ? - à la catastrophe qui vient .

 

La machine est déjà mise en route et chaque rouage s'enclenche, chaque engrenage s'anime tour à tour devant le lecteur .

 

On assiste à la transformation de Florence dont, au moment de l'histoire, Aymeric lui-même se reproche de ne pas avoir eu suffisamment conscience .

 

On devine les manœuvres, les non-dits, les plans préparés à l'avance puis annoncés la bouche en cœur à Aymeric qui est sans cesse mis sur le fait accomplis . Etape par étape, on observe la destruction de chaque pan de ce qu'il avait construit .

 

Relégué au rang de parrain puis soudain il est question de " tourner la page du passé " et d'un déménagement à Montréal . Au Canada .

 

C'est la séparation . Le déchirement sec et brutal d'Aymeric et de Jim, de celui qui fut un père en tout sauf par le sang et de son fils . " J’ai sorti mon téléphone pour leur envoyer un SMS et il s’est mis à sonner avant même que j’aie commencé à écrire. C’était Florence. Et c’était Jim à l’autre bout. Alors je me suis mis à chialer comme un môme. Lui aussi chialait. J’essayais de le rassurer. Ne t’en fais pas, on va se revoir bientôt. D’accord, toi aussi ne t’en fais pas. Allez, je vais raccrocher. Mais je voulais juste te dire une chose, je voulais te dire que c’est toi mon papa. "

 

Ce sont les mensonges, les appels de plus en plus rares, les promesses, les excuses peu crédibles de " Flo ", les pannes de batterie inopinées, puis plus rien . Une boîte mail obstinément vide et un numéro désormais injoignable .

 

Le roman de Jim va alors devenir le roman d'une lutte entre d'un côté cet amour paternel qui s'accroche à grands coups de souvenirs nostalgiques, d'attente brûlante, d'espoir, et de l'autre cette absence absolue de la moindre nouvelle, absence dressée tel un mur, cette séparation arbitraire et nette à laquelle Aymeric ne peut rien et le quotidien violemment indifférent qui continue sa marche .

 

Aymeric obtiendra le fin mot, d'un égoïsme et d'une cruauté à la fois ahurissante et banale, de la bouche de Florence bien plus tard .

 

Quelle dénouement sera le meilleur pour Jim ? Que devient l'amour face au vide de plusieurs années et à tellement de mensonges et de dégâts ? La suite de l'histoire tentera d'y répondre .

 

 

 


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