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KarineFnacNice

Il y a 2 ans | 120 vues

Les enfants endormis - Anthony Passeron

Le livre s’ouvre avec l’évocation d’un voyage qu’a fait le père de l’auteur à Amsterdam, son voyage le plus lointain, pour aller y chercher son frère Désiré et le ramener dans leur village de l’arrière-pays niçois. « Ce gros con de Désiré ! »
Celui dont le nom évoque tant de chagrins.
Dans la famille, Désiré est le fils aîné d’Emile et de Louise, qui tiennent la boucherie du village. Ce sont des travailleurs acharnés, et Louise est attachée à la réputation des siens, elle qui, venant du Piémont, a connu les humiliations réservées aux immigrés. 
Désiré (est-il le fils préféré ?) sera interne au lycée à Nice, obtenant son baccalauréat, et décrochant un emploi chez le notaire du village, la consécration. Jacques, le cadet, travaillera avec ses parents dans la boucherie familiale.
Un tableau idyllique. Sauf que.
Sauf qu’après avoir arrosé la jeunesse citadine du littoral, les dealers trouvent en celle des vallées un nouveau débouché. Et les jeunes s’ennuient, dans leurs villages. Ils ne veulent pas vivre comme leurs parents, ils sont en quête d’autre chose, de quelque chose de plus excitant. Ce sera l’héroïne. Et les seringues qu’on s’échange. Nous sommes dans les années 80.


Parallèlement au drame que va vivre sa famille, Anthony Passeron nous raconte l’histoire de la lutte contre le sida.
Les premières observations perplexes des médecins face à des patients jeunes et apparemment en bonne santé, soudainement touchés par des formes particulières de pneumonies ou de cancers de la peau. L’hypothèse émise que cette maladie nouvelle serait due à un virus. Les recherches, longues et erratiques, pour identifier ce virus et son mode de fonctionnement. Les multiples tentatives pour aboutir à un traitement, entre espoirs et déceptions, controverses et débats.


Car c’est bien le sida, qui va se fracasser contre Désiré, sa femme et sa fille. Contre Louise et Emile, et contre tous les autres. Qui va l’éprouver, malgré le déni, malgré la lutte.
Et, le temps d’une lecture, nous faisons nous aussi partie de cette famille. Anthony Passeron a réussi ce qui est le plus beau en littérature : faire sortir le lecteur de lui-même.
Les enfants endormis est un livre dur, bien-sûr. Mais c’est aussi, et surtout, un des plus beaux que j’aie lus en cette rentrée.
 


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