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Nathavh
Expert

Il y a 1 an | 131 vues

Reste Adeline Dieudonné

Adeline Dieudonné confirme son talent d'écrivaine, elle nous emmène pour son troisième opus dans un registre différent.  Un sujet lourd, difficile mais traité avec une écriture légère, qui parvient à le rendre lumineux.

La narratrice va fêter ses 41 ans.  Elle est avec son amant M., dans un chalet au bord du lac.  M comme à l'habitude s'est levé le premier et est parti se baigner, mais il ne reviendra pas, victime d'une crise cardiaque.  La narratrice plutôt que de prévenir les secours ne peut se résoudre de le quitter, elle reste blottie contre son corps, elle veut encore l'aimer, le caresser, le garder près d'elle.  Il lui est impossible de le rendre à sa famille, de l'abandonner seul à la morgue... Alors elle va emmener le corps sur la banquette arrière de sa voiture pour six jours de folie.

Elle va par empathie écrire à sa veuve deux longues lettres pour lui raconter ses amours secrètes, ses sentiments, un pan de sa vie mais aussi surtout pour lui confirmer que oui M aimait sa femme.

Vu comme cela, cela peut vous sembler effrayant.  Adeline aime nous bousculer, nous choquer mais je vous rassure l'aspect glauque et morbide n'est pas présent, il est gommé par l'écriture légère et spontanée.  Une plume tout en tendresse et subtilité, poétique.

Ce récit nous questionne sur la mort qui est une réalité de nos vies, un sujet tabou qu'elle décrit mais surtout que se passe-t-il lorsque la mort surgit dans un couple illégitime?

Amour, deuil et rapport au corps.  Une histoire d'amour hors normes écrite avec beaucoup d'humanité.

Ma note : 9/10

Les jolies phrases


 

On ne réalise pas que la vie allège les corps.

On ne finit jamais de connaître l'autre.  Au début cela m'effrayait, puis j'ai appris à aimer ces parts d'ombre.

Je crois que la vérité est toujours plus douce que les fantasmes.

Le présent ne ma va pas, je retourne à mes souvenirs.

J'étais un monstre, ce que je faisais était monstrueux, le savoir ne m'empêchait pas de le faire.

Je n'envisageais pas de devenir la maîtresse d'un homme marié, et je ne l'imaginais pas me quitter.

Il y a une part de transformation dans les histoires d’amour, j’en suis certaine, mais le désir qui meurt, c’est le désir qui meurt. Point.

Les années avec Romain sont des années d'oblitération.  Si je voulais en parler avec douceur, je dirais que j'avais dressé un rideau de velours épais à l'intérieur de moi, derrière lequel j'avais caché mes besoins, mes aspirations, ma créativité.  Derrière lequel je m'étais effacée.  Si je voulais en parler avec plus de dureté j'évoquerais un cachot.

Trente kilos de différence, ce n'est rien. Ça n'est pas un sanglier, c'est juste un homme. Et moi je ne suis pas une biche. Mais depuis toujours on m'a répété que les hommes sont plus forts, dangereux. Les femmes sont les victimes, les hommes les agresseurs. Et moi je n'ai pas osé vérifier.

Si ça n'est pas grave, c'est qu'il ne s'est rien passé. S'il ne s'est rien passé, le sanglier n'existe pas. C'est fou le pouvoir que j'ai. Si je décide qu'il ne m'a pas violée, le viol n'a pas eu lieu. C'est magique. Pas de douleur, donc pas de victime, donc pas de crime. Circulez.J’avais entendu dire que ça skiait encore tout là-haut, à grand renfort de canons à neige. Je n’ai jamais bien compris ce goût de s’entasser dans des bennes à humains pour aller se déchirer les ligaments croisés entre la raclette et le vin chaud. Peut-être que je rate quelque chose.
 

La vie de couple, on croit que ce n'est que de l'amour, mais je voudrais avoir accès aux pensées intimes de tous les couples du monde, spécialement ceux qui ont des bébés, même quand ils s'aiment, même quand tout va bien, je suis prête à parier mon clito qu'ils ont tous ces pensées qu'ils confinent tous à une forme de détestation de l'autre à un moment.

 

 


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