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rose612
Explorateur

Il y a 1 an | 130 vues

Petite Poupette

Toute mon enfance et adolescence, je passais mes vacances chez mes grands-parents maternel. Un jour, je devais avoir dix huit ans environ, mon grand-père s'est planté devant moi en déclarant "vous autres, les jeunes, vous croyez avoir inventé les cochonneries mais c'est pas vrai ! Nous aussi on en a fait, té je te raconte ". Et il m'a raconté. Les yeux encore pleins de gaieté, lui qui parlait si peu, m'a livré une aventure de sa jeunesse.

 

Pour rentrer chez lui, il devait passer derrière un bar, le chemin était sombre la nuit et il y avait fait une drôle de rencontre. Je le laisse vous la conter :

 

Petite Poupette, le souvenir est doux

D'un soir de juin mille neuf cent trente cinq

Rentrant chez moi, dans l'obscurité du chemin

Quand, furieusement, tu t'es jetée à mon cou

 

J'avais seize ans, joli garçon, tendre puceau

J'ai goûté ces lèvres charnues que tu m'offrais

Ton cou et ta taille fine, j'ai effleuré

Pendant que tout mon corps subissait tes assauts

 

A travers nos tissus, je sentais ton odeur

Une odeur de fille, de foin, de chaleur

Subissais milles pressions de tes doigts dansant

Rougissais devant tes tétons affriolants

 

Je profitais gaiement de ces contacts nouveaux

Agitant mon ventre et bandant mon pipeau

Déjà affamée, tu ouvrais mon pantalon

Pauvre de moi, je n'étais pas ton étalon

 

Alors j'ai pris tes frêles mains dans les miennes

Avec respect, ai embrassé ces porcelaines

Puis, j'ai avoué ma conduite scélérate

Mon ignoble tromperie de vilain gars

 

"Délicate Esméralda, j'ai vu ton désir

Fière fournaise qui te soumet aux plaisirs

Mais je ne suis que Paul, la nuit t'a trompée

D'allure proche de celle de ton aimé"

 

Paul, apprenti, j'habite la maison d'en haut…

 

Et je ne peux honnêtement combler tes vœux

Éternellement, je serai reconnaissant

Moi le pauvre puceau, de cet éveil fiévreux

Que tu m'as donné, offert si entièrement

 

Je t 'ai volé quelques baisers fougueux

Quelques caresses passionnées

J'ai goûté ta joie de vivre

Ton soleil au clair de lune

Mais ta petite fleur, ma douce

T'appartient.

Pardonne-moi,

Tu étais si belle…

Jusqu'à ma mort, je penserai à toi

 

Je n'ai jamais compris pourquoi il m'avait raconté cela mais j'ai recueilli ce précieux souvenir. Précieux à double titre.

Le premier parce que son "vous autres les jeunes…" me plaçait dans la catégorie des adultes sexués et je crois bien que c'était la première fois. Habituellement, on me confinait au rôle de "bête à apprendre". Cette simple phrase là me donnait le statut de jeune fille en fleur tant attendu. Précieux ce souvenir l'était aussi par la rareté des paroles. Mon grand-père avait connu la misère et n'en parlait jamais. Il avait connu la guerre et n'en parlait jamais, il avait connu la douleur de perdre deux enfants et n'en parlait jamais. Non, le souvenir qu'il me léguait était fait de joie. D'ailleurs, en me le racontant, il affichait un sourire malicieux (et rare). Ses yeux étaient remplis d'étincelles, d'une immense envie de vie et d'un brin de fierté aussi, je crois. À ce moment-là, il me donnait un morceau de lui et une clé : ne te retourne pas sur le passé mais conserve les bons moments.

Le moment venu,( il est proche), je conterais à ma fille cette histoire pour lui accorder sa fleur de jeune fille.


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