Un sang d'encre de Vincent Ejarque

1983. Cadalen, journaliste un peu paumé, voir désabusé, est venu de la capitale pour enterrer un vieux copain de régiment dans le Sud-ouest. Il se retrouve embauché par un patron de la presse régionale locale. Le chef de la sécurité d'une grosse entreprise du coin vient d'être sauvagement assassiné par un gang cagoulé. Des scoops relanceraient les ventes du canard.

 Cadalen, épaulé par un photographe sans scrupule mène l'enquête dans une région secouée depuis des années par la crise économique, les nombreux licenciements et les soubresauts de la guerre d'Algérie. Il côtoie les potentats politiques locaux pas avares en manœuvres répugnantes et autres truands à leur solde. Les notables véreux se sentent visés, les menaces à son encontre ne tarderont pas. En revanche, se faire tirer dessus…

 Ejarque mêle avec virtuosité l'action pure, une intrigue brillamment tissée et les ressorts intimes qui forment la fine psychologie de ses personnages. Une riche panoplie de tronches énigmatiques, drôles, pathétiques, souvent  attachantes. Tout est dans l'épaisseur du trait, la densité émotionnelle. L'auteur passe de scènes émouvantes, violentes, à des situations désopilantes de façon remarquable. Un récit qui dépeint aussi admirablement une époque, celle de la France des années 1980, confrontée à la débâcle industrielle et à la montée des idées d'extrême droite. Un polar social de qualité, un vrai et grand roman noir. Remarquable.