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Lebrac25
Débutant

Il y a 2 ans | 337 vues

Le trésor littéraire Espagnol

C'est en 1605 - durant le siècle d'or espagnol - qu'est paru ce roman . Une floraison artistique ainsi qu'un rayonnement politique et financier ( grâce aux opportunités apportées entre autres par le nouveau monde américain ) fait briller l'Espagne . 

Le feu d'artifice d'humour et d'érudition que va allumer Miguel de Cervantès s'inscrit pleinement dans son temps optimiste et tourné vers l'avenir … et pourtant, quatre cent ans après, il explose toujours avec autant de plaisir pour le lecteur . 

En résumé : Alonso Quichana ( ou Quesada ? À moins que ça ne soit Quechana ? se demande le narrateur ) se rêve chevalier . Le gentilhomme sans histoire vibre à la lecture des exploits de ses idoles moyenâgeuses et de cet âge d'or qu'il voudrait tellement, tellement ressusciter de ses mains ; aussi, il ne laisse pas la si terne et contrariante réalité le stopper : il y va . Il est né des siècles trop tard ? C'est juste une triviale question de chiffres, ça . Il a l'esprit d'un justicier de la table ronde et il va le prouver . 

Son destrier ? Une sympathique vieille rosse qu'il nommera très justement Rossinante .  

Son fidèle écuyer ? Un paysan bourru, mais amical et serviable au possible, plus terrien pur et dur que rêveur qui répond au nom de Sancho Panza . Quand son maître regarde un peu trop les nuages et s'y égare, il le ramène sur terre avec plus ou moins de succès . 

Pour tout le reste, il est avant tout équipé d'une motivation indestructible, d'un cœur débordant d'une indignation et d'une execration sincère pour l'injustice ainsi que d'une imagination qui confine à la folie la plus joyeusement incontrôlable . 

À partir de là, par un matin ensoleillé et suffoquant, il part et l'une des plus belles ( et des plus drôles également ) aventures de l'histoire de la littérature peut commencer . 

C'est le Sacré Graal des Monty Python écrit à l'avance par un auteur visionnaire de l'absurde .

C'est la parodie la plus loufoque des romans de chevalerie qui flirte avec l'hommage le plus élégant .

C'est le gag le plus truculent ( le temps de la renaissance étant propice aux errements corporels comme en témoignera aussi Rabelais en France ) couplé au style le plus ciselé, le plus savant et vivant . 

C'est la grosse blague grasse qui - au détour d'une ligne - peut céder la place à une saillie d'une redoutable intelligence : qu'on ne s'y trompe pas, le chevalier à la triste figure n'ayant rien, mais alors rien, d'un imbécile . 

Que le lecteur qui serait sur le point de se laisser tenter ne s'arrête pas seulement à la célèbre image de la maladresse des moulins à vent, il risquerait de passer à côté d'un héros touchant . Un hidalgo conscient des rires qu'il provoque, de l'agacement qu'il suscite et des médisances que font naître sa folie littéraire et passionnée autour de lui … mais suivant ses rêves avant tout . Même avant la lourde conscience de soi et avant l'étiquette si stricte qui régissaient les mœurs de la noblesse Espagnole au temps qu'il choisit de délaisser pour vivre ses péripéties médiévales romanesques . 

On ne peut pas faire plus libre . 

 


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