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EglantineLilas
Légende

Il y a 3 mois | 94 vues

LA CROISEE DES CHEMINS

Elle mit ses boites de mouchoirs à la poubelle déjà pleine par ceux usagers, retrouva le chemin du salon de son coiffeur et même de l’esthéticienne, avant de rénover, pour partie du moins, sa garde-robe !  Elle reprit enfin une activité professionnelle, ce qui favorisa de nouvelles rencontres. Elle fut désirée et devint désirable.

Il était temps Martha, que de temps perdu !

Oh toi la petite voix silence ! Tu crois que c’était facile de se sentir répudiée !

– Répudiée… Répudiée comme tu y vas ! Des milliers de femmes… Et d’hommes vivent cette situation… Plus ou moins intelligemment d’ailleurs.

– Oui, bon, passons… C'est comme ça que je le ressentais ! Je n’ai pas la prétention de me présenter en modèle à suivre, mais plutôt à éviter, c’est bon comme ça ?

Martha, la prude, oublia au fil des jours, ses principes sur la fidélité dans un couple. Elle succomba au charme de quelques soupirants, pour se prouver qu’elle existait encore en tant que femme, avant  de rencontrer l’homme qui devint véritablement son amant.

– Et là, tu trouvais la situation normale ?

– Normale peut-être pas, un juste retour de situation, oui !

– Aucune gêne ni honte ?

– Hum comment dire… Un peu quand même ! Mais n’y a-t-il pas un dicton qui dit qu’un moment de gêne ou de honte, je ne sais plus, est vite passé ?

Elle s’ouvrit de nouveau à la vie, découvrit avec surprise et bonheur que son corps pouvait éprouver un plaisir différent, mais oh combien jouissif, de celui qu’elle avait connu trop jeune, avec son mari.

– Comme quoi tu vois tu n’as pas tout perdu !

– Tu me fais rire, dans un sens, tu n’as pas tout à fait tort !

– Si Paul n’avait pas commencé, aurais-tu sauté le pas ?

– Non… je m’imaginais que mon amour pour Paul était le seul au monde possible !

– Eh bien voilà au moins une bonne chose que tu as apprise !

Non seulement, elle découvrit à nouveau le plaisir physique qu’elle avait boudé auprès de Paul pendant un certain temps, mais aussi les longues discussions harmonieuses, des moments de bonheur partagés avec intensité. Cependant, jamais, elle n’envisagea de quitter Paul, tout en continuant à se sentir toujours aussi blessée par son comportement.

– Il y a quelque chose que je ne comprends pas là non plus…

– Et quoi donc encore ? Tu n’as que des questions, jamais de réponse ?

– Les réponses, c'est à toi de me les donner.

-               Tu avais un amant qui te comblait moralement et physiquement, et malgré ça, tu étais jalouse de ce que faisait Paul, je ne comprends pas ?

– Le grand mot est lâché ! Jalouse oui, j’étais jalouse… à moins que ce ne soit, qui sait, une maladie d’amour ? En fait, est-ce que j’étais jalouse de lui qui s’épanouissait ou de la femme qui, à ce moment-là, le rendait heureux ? Comment savoir, même avec le recul, je ne saurais le dire !

– Tu voulais tout et comme on dit - le beurre et l’argent du beurre - ?

– C’était un peu ça… Je dois être un peu possessive si c’est ça que tu veux me faire dire, voilà, c’est dit, tu es contente ?

– En résumé, dans une situation conjugale ou l’un des deux commet l’adultère, tu conseilles à l’autre partenaire de prendre, un amant dans le cas présent, ou une maitresse pour l’homme, pour donner une nouvelle chance au couple ?

– Hum… Tu vas un peu vite en conclusion. Tout dépend sur quelle base le couple s’est construit…

– Comment ça ?

– Nous étions partis non seulement pour former un couple, mais aussi pour créer une nouvelle cellule familiale. Chaque situation est bien particulière… Dans mon cas, le fait d’avoir à une certaine période un amant qui m’apportait ce que Paul me refusait en quelque sorte, et même plus, oui, cela a été une décision que je n’ai jamais regrettée.

– De là à dire que c’est un remède miracle ?

– Ah non, je ne dirai pas ça !

Paul, avait pris l’habitude de partir tôt le matin depuis longtemps déjà, prétextant la circulation difficile, et   rentrait assez tard le soir. Le travail disait-il, parfois sans doute était-ce justifié. Il arrivait pour l’heure du souper la plus tard du temps. Travaillait-il vraiment tard ou bien d’autres plaisirs l’occupaient ailleurs, Martha préférait ne plus se poser la question depuis qu’elle avait retrouvé un certain équilibre personnel.

– Difficile de savoir avec son comportement, de faire le tri entre les obligations professionnelles et ses plaisirs extra-conjugaux ! Il a fallu s’y faire… Ou partir !

Les enfants ayant quitté le nid, elle se sentit alors libre de prendre quelques libertés avec ses propres absences à domicile, et fit de même assez souvent. Les fins de semaines restaient toutefois consacrées à de rares exceptions près, à la famille qui se retrouvait à la maison, ou encore à des amis qui venaient grossir la cellule.

– Les enfants n’ont jamais déserté le havre familial, bien au contraire !

Paul, malgré ses distractions extérieures, garda toujours la prétention de tout régenter au logis. C’est à cette même époque que Martha fit savoir haut et fort qu’elle n’était plus disposée à subir en permanence ses directives.

Il va falloir l’affronter une bonne fois pour toutes, en choisissant le moment approprié, c'est-à-dire le jour où la goutte d’eau fera déborder le vase, sinon je n’y arriverai jamais. Je l’entends déjà :

Allons bon, c'est nouveau ça, Madame veut faire partie du mouvement de libération de la femme sans 

doute !

-   Ce n’est pas tout à fait comme ça que je ressens les choses ! Moi, je dirais plutôt me libérer du joug de l’homme qui partage ma vie !

Paul, n’en revenait pas ! Aussi, s’il n’y eut jamais de vaisselle cassée, ils avaient trop l’un et l’autre le sens de la valeur des choses. Des désaccords sonores refaisaient surface parfois, mais c’était la plupart du temps pour des futilités.

– J’étouffe ! Il est temps que je décide moi-même de certaines actions, sans avoir à lui rendre compte ou lui demander la permission !

Cela ne fit pas non sans mal, Martha, n’étant pas toujours convaincue d’avoir toujours raison. Elle culpabilisait facilement, tout en ne laissant rien paraitre.  Dans ces moments-là, Paul la regardait de façon étrange, presque malheureux.

En perdant sa jeunesse inévitablement, ce qu’il ne vivait pas forcément bien, fallait-il en plus qu’il perde son pouvoir envers sa femme, n’était-il plus le chef de famille, celui - qui sait - et qui dirige le navire ?

Dans les périodes calmes, des échanges sur la vieillesse et les conséquences sur leur vie future, préoccupaient Paul et Martha.

Le temps - d’après - se profilait inexorablement dans un avenir pas très éloigné pour tous les deux.

― Le temps s’impose à moi, mais je veux accompagner ma vieillesse, que ce mot est triste ! Alors disons plutôt cette évolution due à l’âge. Je veux la gérer et non la subir !  Je sais que je dois faire face à des changements, dont certains sont inévitables et imprévisibles. Ma vie professionnelle est arrivée à son terme, il me reste, toutefois, la richesse de toutes les découvertes que j’ai pu faire tout au long de ma vie. Le plus difficile, c'est d’admettre, de ralentir mes mouvements et mes actes.

― Je te rejoins bien là sur la nécessité à l’avenir de ralentir le rythme de notre vie, et admettre que nous fournissons plus d’effort dans chacun de nos actes, c’est ainsi, il nous faut bien l’accepter bon gré mal gré.

 Il fallut bien du temps pour qu’un léger changement dans leur façon de se comporter l’un envers l’autre, pointe discrètement à l’approche de la retraite. Ce moment si important où le couple doit faire face à une vérité réciproque, à des remises en cause. Les prémices d’une évolution plus sereine, moins agressive, frémissaient très timidement et l’atmosphère se fit un peu plus légère dans la maison.