Le salon du prêt-à-saigner de Joseph Bialot

Dans le quartier du Sentier, il est possible de croiser des stylistes, des prostituées, des familles et parfois des cadavres. Lorsque deux corps sont découverts à quelques jours d'intervalle, le commissaire Faidherbe et l’officier Chaligny sont chargés d'enquêter dans ce village vivant et populaire de Paris où la police n'est pas forcément la bienvenue. Assez vite, les soupçons du duo s'orientent sur Josip, un émigré yougoslave qui a mystérieusement disparu, tandis que les attaques se multiplient…

Flics perturbés, carambolages musclés, une intrigue retorse et corsée, génial. Mais il y a surtout le style particulièrement savoureux, ou l’auteur teinte d’humour à la San Antonio un univers particulièrement vil et retors. La plume est élégante, elle glisse entre la tendresse et la douleur. Bialot a le sens de l'esbroufe et de la dérision, un ton souvent gouailleur et caustique allié à un profond sens du réalisme. Et ce regard délicieusement mordant sur le monde, ces descriptions vives d'un Paris disparu. Un délicieux parfum seventies, Léo Malet et Jacques Tardi ne sont jamais loin. En 1979, il est couronné du Grand Prix de Littérature policière. C’est certain, Joseph Bialot est un grand écrivain. Un beau noir corsé qui vaut le détour… Excellent !

Il faut souligner que ce roman est le premier polar d'une longue série, il est publié en 1977 dans la collection « Super Noire », chez Gallimard. Les romans de cet auteur respirent le vécu, ses personnages sont des êtres simples. Piéton de Paris, Joseph Bialot fait de la ville l'héroïne de ses romans avec le quartier du Sentier ("Le Salon du prêt-à-saigner") ou Belleville ("Babel-ville", 1979). Il se consacre à deux sagas historiques "Le Vent du Sud" (1988, 1990) et surtout "Le Semeur d'étincelles" (1996, 1998), vaste fresque sur les luttes ouvrières depuis la Commune jusqu'au début des années 1950. En 2005, il choisit de parler de son enfance dans "Belleville Blues". Puis comme une dernière boucle, il signe un grand roman historique  en 2009, son ouvrage "186 marches vers les nuages" évoque des événements peu connus de la Seconde Guerre mondiale.