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SophieCSB
Champion

Il y a 3 mois | 130 vues

Qui après nous vivrez, d'Hervé Le Corre

2051, dans une ville de province. Rebecca et Martin sont les heureux parents d’une petite Alice et tentent de vivre tant bien que mal dans cette ville où le chaos est en train de prendre le dessus. La coupure générale d’électricité qu’ils vivent est la goutte d’eau qui vient de faire déborder le vase. Les émeutes éclatent, la police mitraille, les gens se cachent des drones. Un matin, Martin part au travail et ne revient pas. Rebecca s’inquiète, cherche, constate l’état de non-droit dans lequel est tombée la ville. Elle décide de partir avec Alice et une amie médecin. Pour où ? Combien de temps ? Et si Martin revenait ?

Commence ainsi une histoire du devenir de notre monde, tel que nous le connaissons aujourd’hui. Non seulement nous allons découvrir le destin de Rebecca, mais aussi celui d’Alice, devenue adulte, mère à son tour d’une petite Nour, qui elle-même aura une petite Clara. Plusieurs générations donc qui vont devoir se battre, connaitre un monde en reconstruction ou non, essayer de survivre grâce à la solidarité ou au simple bon sens.

L’auteur fait alterner les chapitres racontant l’histoire de Rebecca, Alice, Nour et Clara. Peu à peu, se déploie sous nos yeux le puzzle de cette généalogie féminine, dans le décor apocalyptique d’un monde balayé par les catastrophes naturelles ou humaines. Le lien indéfectible entre toutes ces femmes sera leur intuition et leur vision d’une humanité qu’elles savent déjà condamnée.

 

Quelle claque !!! J’avoue avoir été époustouflée par cette dystopie ultra-riche en rebondissements et détails noirs. Les descriptions de scènes de chaos en ville, la nature brûlée ou dévastée, les maisons éventrées, les cadavres mutilés : tout y passe de façon crue et factuelle. Les images se déploient parfaitement dans nos têtes, et cet avenir ne nous fait pas rêver. D’ailleurs les personnages du roman ne rêvent plus, ils ont oublié le monde « d’avant », celui où on pouvait aller à la plage ou rire à la terrasse d’un café. Seules quelques photos sur de vieux portables qu’on recharge grâce au soleil rappellent ce bon vieux temps. À la vue de notre situation actuelle, qui nous dit que notre futur n’est pas celui-ci ?

Dans les différents épisodes qui émaillent la vie de ces femmes, l’auteur pointe du doigt toutes les dérives qui amènent à la catastrophe : totalitarisme, fanatisme religieux, abus sexuels… Le récit est donc sombre, sans espoir ; on ne vit pas, on survit, et le chacun pour soi est de mise.

Alors quand des groupes de bonne volonté se forment, quand une main secourable vous aide et fait un bout de chemin avec vous, on souffle, on lève les yeux pour s’apercevoir que tout n’est pas forcément fini. Mais la peur demeure, sentiment majeur de cette histoire. C’est assez anxiogène mais cela crée un suspense inégalable.

 

Grâce à une écriture travaillée et magnifique, Hervé Le Corre nous propose ici une vision du monde dévasté qui nous prend aux tripes. Chaque chapitre est un coup de poing dont on se relève difficilement pour replonger avec hâte dans le suivant. La place donnée aux femmes est formidable; leur résilience et leur courage font de « Qui après nous vivrez » un récit bouleversant et addictif !


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