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ORjura
Légende

Il y a 2 mois | 462 vues

L’or des rivières de Françoise Chandernagor

A travers son histoire personnelle, la romancière nous raconte avec poésie et humour, celle de la Creuse et de ses deux rivières : la Grande Creuse qui se calme au confluent de Fresselines où elle rencontre la Petite Creuse, toujours endiablée.

Elle nous confie des secrets et nous apprend bien des choses sur ces maçons contraints, comme son grand-père, de partir travailler dans la région parisienne ; sur les lissiers d’Aubusson ; sur la méfiance des Creusois vis-à-vis des curés et leur croyance dans les pouvoirs des sorciers ; sur la frénésie de Claude Monet captant la lumière de la Creuse…

On se délecte des paysages, des coutumes, et du patois que Françoise Chandernagor connaît bien ! On sent la beauté des lieux, tantôt inquiétants, tantôt merveilleux, qu’elle peint d’une superbe écriture.

« Dans la campagne dénudée, tout, le ciel, l’eau, la terre, prenait peu à peu la couleur du plomb, donnant le sentiment d’une solitude éternelle, d’une tristesse irrémédiable. La Haute-Marche n’est belle, en hiver, que sous la neige (…) une lumière uniforme monte des champs, et, sur ce ciel aussi pâle qu’une page neuve, les couleurs réduites au gris et au noir dessinent de mystérieux idéogrammes. La Creuse s’enfonce dans un cocon ouaté, elle se replie sur elle-même, toutes routes effacées, toutes amarres larguées. Comme un vaisseau fantôme, elle s’embarque pour un voyage sans port, qui rejoint, à l’infini, le point de fuite de nos rêves… ». 

Revenue dans la région de mon enfance - méconnue mais réputée pour ses vins et fromages ! -, je partage avec l’autrice une certaine nostalgie...  Cette liberté d’aller et venir loin du regard parental que les enfants de nos campagnes ne savourent plus, comme jouer dans la rivière et les bottes de paille, ou rouler dans les prés en riant… Je ressens cet amour pour les vaches qu'elle honore dans un chapitre entier, ces animaux sensibles auxquels on ne donne plus de petit nom et qui sont désormais, de la viande sur pattes numérotée...

Le regard qu’elle porte sur la vie des champs, des arbres, des eaux, des animaux et des gens, nous enchante. Mais la tristesse nous prend, à l’aube de ce qu'elle nomme non sans humour, « le Grand Réchauffement ».

Toutefois, Françoise Chandernagor croit en la force de la nature qui peut encore nous surprendre... Et son message nous fait du bien.


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