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Retour au challenge: Souvenirs ensanglantés
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Je me souviens.
De toutes les douleurs qui me clouaient le corps, la première, la plus sourde, la plus écrasante, était celle qui cognait à l’arrière de mon crâne. C’est elle qui me tira d’un long rêve où la terre et les racines les plus profondes étaient devenues ma propre chair, ma seule respiration. D’autres souffrances me paralysaient la face, les bras et les jambes. Mes côtes semblaient s’être retournées en crocs qui me perçaient le torse. Ce ne pouvait pas être réel. Je devais encore errer dans ce rêve qui m’avait englouti. L’humus avait dû me reprendre. Comment expliquer, sinon, que je hurlais sans entendre mon cri ? que j’ouvrais les yeux sans rien voir ? comment expliquer que mes doigts, que j’essayais de mouvoir jusqu’à mon visage, ne parvenaient qu’à griffer la surface moite d’un sol rêche au goût de sang ? Il fallait que je me réveille. Il fallait que je m’arrache de cette souffrance souterraine. Il fallait que la lumière revienne, que les sons reviennent. Il fallait que je me réveille.
Je restais concentré sur cette seule pensée : « Réveille-toi ! Tu ne souffriras plus ! Réveille-toi ! » Rien n’y faisait. J’accompagnais ma volonté de saccades du corps. J’essayais de me redresser. Je tentais de me contorsionner vers la surface de ce cauchemar. Rien ne pouvait me sauver. Je ne faisais que souffrir davantage. Ma tête ne pouvait que cogner le sol. Quand j’arrivais à la rehausser, elle cognait encore. Il n’y avait donc tout autour de moi que l’espace d’un sol, d’un plafond et de murs étroits ? Où gisais-je ? Dans quelle horreur étais-je enseveli ? Etais-je seulement vivant ? Oui. Je ne pouvais être que vivant. J’en étais sûr. Presque mort, sans doute, mais je comprenais que j’étais encore vivant et que mon agonie serait effrayante. Mon cœur, puisqu’il me semblait battre soudain, cognait lui aussi dans ma tête. Mes yeux qui ne servaient à rien roulèrent dans mes orbites. Un hoquet pinça mes vertèbres jusqu’à la nuque . J’espérais la mort. Elle ne vint pas. Le cauchemar reprit. La nuit m’enserra de ses tenailles froides.
Je me souviens.
La voix venait de loin. Moins souvent, d’autres voix aussi se faisaient entendre. Je ne les reconnaissais pas. Je ne les comprenais pas. Il y avait des mots, cependant, que je parvenais à identifier, des mots que je parvenais à stocker dans mon peu de mémoire, des mots dont j’essayais de tisser les liens et qui ne me quittaient pas : « coffre », « comas », « beaucoup de chance ». Ces mots ne me quittaient pas. Ils habitaient ma douleur qui m’enveloppait comme un linceul.
Je me souviens.
Pour la première fois, j’entendais distinctement la voix. J’avais les yeux ouverts et je voyais. Les mots pleuvaient sur moi, un à un, comme des flocons sur un lit de neige. Je me souviens. « Tout va bien, mais il faut encore vous reposer. Tout va bien. Vous revenez de loin. Le tueur au marteau a dû vous croire mort. C’est ce qui vous a sauvé. A présent, tout va bien. Il faut vous reposer. »
De toutes les douleurs qui me clouaient le corps, la première, la plus sourde, la plus écrasante, était celle qui cognait à l’arrière de mon crâne. C’est elle qui me tira d’un long rêve où la terre et les racines les plus profondes étaient devenues ma propre chair, ma seule respiration. D’autres souffrances me paralysaient la face, les bras et les jambes. Mes côtes semblaient s’être retournées en crocs qui me perçaient le torse. Ce ne pouvait pas être réel. Je devais encore errer dans ce rêve qui m’avait englouti. L’humus avait dû me reprendre. Comment expliquer, sinon, que je hurlais sans entendre mon cri ? que j’ouvrais les yeux sans rien voir ? comment expliquer que mes doigts, que j’essayais de mouvoir jusqu’à mon visage, ne parvenaient qu’à griffer la surface moite d’un sol rêche au goût de sang ? Il fallait que je me réveille. Il fallait que je m’arrache de cette souffrance souterraine. Il fallait que la lumière revienne, que les sons reviennent. Il fallait que je me réveille.
Je restais concentré sur cette seule pensée : « Réveille-toi ! Tu ne souffriras plus ! Réveille-toi ! » Rien n’y faisait. J’accompagnais ma volonté de saccades du corps. J’essayais de me redresser. Je tentais de me contorsionner vers la surface de ce cauchemar. Rien ne pouvait me sauver. Je ne faisais que souffrir davantage. Ma tête ne pouvait que cogner le sol. Quand j’arrivais à la rehausser, elle cognait encore. Il n’y avait donc tout autour de moi que l’espace d’un sol, d’un plafond et de murs étroits ? Où gisais-je ? Dans quelle horreur étais-je enseveli ? Etais-je seulement vivant ? Oui. Je ne pouvais être que vivant. J’en étais sûr. Presque mort, sans doute, mais je comprenais que j’étais encore vivant et que mon agonie serait effrayante. Mon cœur, puisqu’il me semblait battre soudain, cognait lui aussi dans ma tête. Mes yeux qui ne servaient à rien roulèrent dans mes orbites. Un hoquet pinça mes vertèbres jusqu’à la nuque . J’espérais la mort. Elle ne vint pas. Le cauchemar reprit. La nuit m’enserra de ses tenailles froides.
Je me souviens.
La voix venait de loin. Moins souvent, d’autres voix aussi se faisaient entendre. Je ne les reconnaissais pas. Je ne les comprenais pas. Il y avait des mots, cependant, que je parvenais à identifier, des mots que je parvenais à stocker dans mon peu de mémoire, des mots dont j’essayais de tisser les liens et qui ne me quittaient pas : « coffre », « comas », « beaucoup de chance ». Ces mots ne me quittaient pas. Ils habitaient ma douleur qui m’enveloppait comme un linceul.
Je me souviens.
Pour la première fois, j’entendais distinctement la voix. J’avais les yeux ouverts et je voyais. Les mots pleuvaient sur moi, un à un, comme des flocons sur un lit de neige. Je me souviens. « Tout va bien, mais il faut encore vous reposer. Tout va bien. Vous revenez de loin. Le tueur au marteau a dû vous croire mort. C’est ce qui vous a sauvé. A présent, tout va bien. Il faut vous reposer. »
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