Veuillez commenter votre vote
, (0/0)
Retour
Mon Filou.
En cette froide nuit de février je t’ai réchauffé, bercé, câliné. Lové dans les draps tu somnoles, prêtes ton dos aux effleurements de mes doigts et je sens tes muscles s’assouplir sous ma peau qui recherche la douceur de la tienne. Ton souffle s’allonge reprend le tempo des longues siestes de l’été. Tes paupières frémissent à l’écoute de mon cœur dont les battements orchestrent la chamade du tien. J’ai enfoui mon visage dans ton cou, niché mon nez sous le pavillon de ton oreille, t’ai murmuré:
- Il n’y aura jamais de place pour un adieu, entre nous ; c’est un toujours qui nous unit mon Filou.
Tu as étiré tes membres, renversé ta tête dans un grand soupir pour déglutir dans un semblant de sourire. Ton torse s’est creusé sous ma main. Abandonnée dans la tiédeur du lit je te couve du regard.
Débarqué un soir dans ma vie comme un intrus tu n’en étais plus ressorti. J’ai pourtant mis de la distance entre nous mais chaque jour tes yeux m’attendaient au coin de la rue. Je changeais de trottoir mais je savais que tu m’emboîterais le pas. Que derrière moi tu collerais à mon ombre. Combien de fois t’ai-je laissé piteux et résigné derrière le portail du jardin ? Je ne sais !
Ma mère n’était pas en reste pour que je fasse fi de ton insistance. Elle te trouvait minable, sans classe, sans élégance, te soupçonnait un peu voleur, sûrement squatteur, ça dépendait de ses humeurs. Ainsi chaque jour nous nous accompagnions sans nous regarder et chaque jour nous nous quittions tourmentés par l’idée que nous pourrions peut-être, ensemble, rester.
Et puis un soir de juin, tu n’étais pas au rendez-vous. J’ai eu peur que cela ne soit pour toujours car te voir était déjà pour moi signe d’amour. Le sommeil m’a boudée, les pires pensées ont habité ses heures et ma mère au matin s’est félicitée de ton absence pensant trois jours durant que je finirais par t’oublier…
Mais c’était sans te connaître ! Le jeudi soir alors que je remontais de l’arrêt de bus, mon cœur a bondi, je t’ai vu. Tu semblais sortir d’une rixe, tu boitais, rasais les murs. Alors c’est moi qui t’ai suivi jusque chez moi, c’est moi qui t’ai poussé dans le jardin, qui t’ai ouvert la porte en m’écriant :
-Maman regarde qui vient nous voir !
Depuis quinze ans tu es là mon Filou aimant et fidèle à nos côtés. Tu t’es posé dans ma vie parce qu’on s’était choisis. Tu as conquis mon père, muselé ma mère et pris tes pénates discret et séducteur. Dans le couloir je les entends qui font les cent pas, qui parlent tout bas.
Le ciel s’adoucit de rose et la chambre se teinte de rais irisés qui dorent ton pelage de reflets moirés. Tes douces oreilles se couchent, soudain tes yeux chavirent et c’est dans un frisson qu’on se quitte , mon chat de gouttière, mon amour des rues.
A l’aube ils sont venus chercher ton âme. Ont bousculé mes larmes . Dans le jardin ils ont creusé un trou.
Je t’ai bordé doucement dans mon chandail bleu où tu aimais tant te prélasser en ronronnant. Avec ma lettre…
Adieu
En cette froide nuit de février je t’ai réchauffé, bercé, câliné. Lové dans les draps tu somnoles, prêtes ton dos aux effleurements de mes doigts et je sens tes muscles s’assouplir sous ma peau qui recherche la douceur de la tienne. Ton souffle s’allonge reprend le tempo des longues siestes de l’été. Tes paupières frémissent à l’écoute de mon cœur dont les battements orchestrent la chamade du tien. J’ai enfoui mon visage dans ton cou, niché mon nez sous le pavillon de ton oreille, t’ai murmuré:
- Il n’y aura jamais de place pour un adieu, entre nous ; c’est un toujours qui nous unit mon Filou.
Tu as étiré tes membres, renversé ta tête dans un grand soupir pour déglutir dans un semblant de sourire. Ton torse s’est creusé sous ma main. Abandonnée dans la tiédeur du lit je te couve du regard.
Débarqué un soir dans ma vie comme un intrus tu n’en étais plus ressorti. J’ai pourtant mis de la distance entre nous mais chaque jour tes yeux m’attendaient au coin de la rue. Je changeais de trottoir mais je savais que tu m’emboîterais le pas. Que derrière moi tu collerais à mon ombre. Combien de fois t’ai-je laissé piteux et résigné derrière le portail du jardin ? Je ne sais !
Ma mère n’était pas en reste pour que je fasse fi de ton insistance. Elle te trouvait minable, sans classe, sans élégance, te soupçonnait un peu voleur, sûrement squatteur, ça dépendait de ses humeurs. Ainsi chaque jour nous nous accompagnions sans nous regarder et chaque jour nous nous quittions tourmentés par l’idée que nous pourrions peut-être, ensemble, rester.
Et puis un soir de juin, tu n’étais pas au rendez-vous. J’ai eu peur que cela ne soit pour toujours car te voir était déjà pour moi signe d’amour. Le sommeil m’a boudée, les pires pensées ont habité ses heures et ma mère au matin s’est félicitée de ton absence pensant trois jours durant que je finirais par t’oublier…
Mais c’était sans te connaître ! Le jeudi soir alors que je remontais de l’arrêt de bus, mon cœur a bondi, je t’ai vu. Tu semblais sortir d’une rixe, tu boitais, rasais les murs. Alors c’est moi qui t’ai suivi jusque chez moi, c’est moi qui t’ai poussé dans le jardin, qui t’ai ouvert la porte en m’écriant :
-Maman regarde qui vient nous voir !
Depuis quinze ans tu es là mon Filou aimant et fidèle à nos côtés. Tu t’es posé dans ma vie parce qu’on s’était choisis. Tu as conquis mon père, muselé ma mère et pris tes pénates discret et séducteur. Dans le couloir je les entends qui font les cent pas, qui parlent tout bas.
Le ciel s’adoucit de rose et la chambre se teinte de rais irisés qui dorent ton pelage de reflets moirés. Tes douces oreilles se couchent, soudain tes yeux chavirent et c’est dans un frisson qu’on se quitte , mon chat de gouttière, mon amour des rues.
A l’aube ils sont venus chercher ton âme. Ont bousculé mes larmes . Dans le jardin ils ont creusé un trou.
Je t’ai bordé doucement dans mon chandail bleu où tu aimais tant te prélasser en ronronnant. Avec ma lettre…
Adieu
Veuillez commenter votre vote
, (0/0)
15/05/2024 00:43
Pas facile lorsqu ils nous quittent 🥲une très belle lettre 😘
15/05/2024 09:04
En fait, Eglantine, je crois qu'ils ne nous quittent jamais 😒Merci pour votre lecture.😊
14/05/2024 16:43
Très joli texte, assez énigmatique il faut attendre "la chute" J'aime beaucoup
15/05/2024 09:03
Merci pour votre appréciation Catflanagan 😊
13/05/2024 15:51
Quelle belle lettre J.. Je pense depuis longtemps, qu'à qui n'apprécie pas "les bêtes", il manque peut-être quelque chose... (Ton écriture est si séduisante, en plus !) ❤️
15/05/2024 09:01
Merci OR...,tu sais combien je partage ton avis sur le regard et l'attachement que l'on donne au monde animal.😊
13/05/2024 10:16
Une lettre émouvante et touchante.🥲
15/05/2024 08:58
merci Caroline, Filou le méritait .