Veuillez commenter votre vote
, (0/0)
Retour
Lettre à Beaudelaire
Monsieur,
Comme vous l’affirmez : « Au pays parfumé que le soleil caresse » je reconnais là une délicieuse éloge à mon enivrante terre natale.
Vingt ans ont passé. J’aurais pu inventer de romanesques fariboles sur ces femmes qui ont marqué votre vie ici. Mais par respect et fidélité à votre poésie, j’ai tenu à vous livrer des réponses tangibles. Fervent admirateur de votre œuvre, j’ai relu vos recueils à l’affut du moindre indice pour mener une enquête rigoureuse dont voici le fruit.
Je dois tout d’abord vous annoncer une fort triste nouvelle. Madame Autard de Bragard est décédée. La Dame créole aux charmes ignorés a succombé sur le bateau qui l’emmenait vers la France en 1857.
La suite de mon investigation s’est révélée plus réjouissante.
J’ai cherché dans le sud les traces de la Malbaraise. Et découvert avec soulagement que le sort lui fut clément. Il vous plaira de savoir qu’elle déambule toujours grâcieuse et moitié nue sur les chemins aux multiples senteurs de Grand Bois. J’en réponds pour l’avoir vu de mes propres yeux. Elle ne rêve plus de France. Son fils suffit à son bonheur. Mais quand j’ai prononcé votre nom un voile de nostalgie a recouvert le velours de son regard. Ah j’oubliais : le jeune homme se nomme Charles.
Enfin, demeurant depuis toujours à Hell-Bourg, retrouver Dorothée me fut tâche aisée. Après votre départ elle dut encore entasser piastre sur piastre car Marie affranchie, il lui fallut « racheter » son autre petite soeur Vitaline à ce maudit planteur de tabac. Vous savez qui… Elle vous en dirait pis que pendre sur cet esclavagiste. Mais laissons là ce passé sordide. Toujours forte et fière à l’approche de la cinquantaine, votre belle Dorothée vit à Salazie avec son fils, ébène comme elle, et exécute encore une cuisine grasse et excitante. Voyez, elle est restée celle qui naguère vous éblouit et vous inspira.
Filles-mères, elle, comme d’autres affranchies, vivent de petits travaux de couture ou de vannerie. Certaines travaillent dans les villas qui fleurissent à Hell-Bourg depuis que la fraîcheur de l’air et les thermes construits en 1852 attirent les bourgeois du littoral. Les plus miséreuses se nourrissent de fruits, brèdes et autres plantes trouvées dans la nature fort heureusement généreuse par ici. La liberté recouvrée depuis treize ans est leur seul bien. Mais n’est-ce-pas le plus précieux ?
Monsieur,
Comme vous l’affirmez : « Au pays parfumé que le soleil caresse » je reconnais là une délicieuse éloge à mon enivrante terre natale.
Vingt ans ont passé. J’aurais pu inventer de romanesques fariboles sur ces femmes qui ont marqué votre vie ici. Mais par respect et fidélité à votre poésie, j’ai tenu à vous livrer des réponses tangibles. Fervent admirateur de votre œuvre, j’ai relu vos recueils à l’affut du moindre indice pour mener une enquête rigoureuse dont voici le fruit.
Je dois tout d’abord vous annoncer une fort triste nouvelle. Madame Autard de Bragard est décédée. La Dame créole aux charmes ignorés a succombé sur le bateau qui l’emmenait vers la France en 1857.
La suite de mon investigation s’est révélée plus réjouissante.
J’ai cherché dans le sud les traces de la Malbaraise. Et découvert avec soulagement que le sort lui fut clément. Il vous plaira de savoir qu’elle déambule toujours grâcieuse et moitié nue sur les chemins aux multiples senteurs de Grand Bois. J’en réponds pour l’avoir vu de mes propres yeux. Elle ne rêve plus de France. Son fils suffit à son bonheur. Mais quand j’ai prononcé votre nom un voile de nostalgie a recouvert le velours de son regard. Ah j’oubliais : le jeune homme se nomme Charles.
Enfin, demeurant depuis toujours à Hell-Bourg, retrouver Dorothée me fut tâche aisée. Après votre départ elle dut encore entasser piastre sur piastre car Marie affranchie, il lui fallut « racheter » son autre petite soeur Vitaline à ce maudit planteur de tabac. Vous savez qui… Elle vous en dirait pis que pendre sur cet esclavagiste. Mais laissons là ce passé sordide. Toujours forte et fière à l’approche de la cinquantaine, votre belle Dorothée vit à Salazie avec son fils, ébène comme elle, et exécute encore une cuisine grasse et excitante. Voyez, elle est restée celle qui naguère vous éblouit et vous inspira.
Filles-mères, elle, comme d’autres affranchies, vivent de petits travaux de couture ou de vannerie. Certaines travaillent dans les villas qui fleurissent à Hell-Bourg depuis que la fraîcheur de l’air et les thermes construits en 1852 attirent les bourgeois du littoral. Les plus miséreuses se nourrissent de fruits, brèdes et autres plantes trouvées dans la nature fort heureusement généreuse par ici. La liberté recouvrée depuis treize ans est leur seul bien. Mais n’est-ce-pas le plus précieux ?
Veuillez commenter votre vote
, (0/0)
14/05/2024 12:21
C'est bien, mais Baudelaire ne prend pas de E !!!!
14/05/2024 16:36
Et le mot Tolérance prend bien A...
14/05/2024 16:53
😄
14/05/2024 17:52
😀
22/05/2024 11:23
aie aie désolée pour ces fautes d'inatttttension :-)
22/05/2024 11:24
désolée pour ces fautes d'inattttension :-)
22/05/2024 11:24
oh lala en effet